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Alternatives contre le doryphore ?

9 mai 2025 par
Eric

Le doryphore de la pomme de terre (Leptinotarsa decemlineata) fait de nouveau des ravages dans les parcelles de pommes de terre. Après une longue période de contrôle par les produits chimiques, ce ravageur fait son retour, et les producteurs de pommes de terre se trouvent confrontés à un défi de taille. L'absence de solutions efficaces et disponibles dans le cadre de l'agriculture biologique, couplée à la réduction progressive des produits phytosanitaires, appelle à une gestion plus agroécologique et optimisée. 


La situation actuelle : un ravageur difficile à maîtriser

Le doryphore, au stade adulte, est facilement reconnaissable grâce à ses élytres caractéristiques et ses amas de larves orangées. Ce ravageur a la capacité de détruire jusqu’à 100% du feuillage des plants de pomme de terre, entraînant des pertes économiques importantes. 

Après l’accouplement, la femelle pond de nombreux œufs jaune-orange qui éclosent après 4 à 10 jours selon la température ambiante. Les larves se nourrissent du feuillage et parviennent à leur développement complet après 3 mues, elles atteignent la même taille que les adultes en fin de développement. Une larve consomme, au cours de son cycle, 35 à 45 cm2 de feuilles ! Après deux semaines d’alimentation, les adultes ont la capacité de se reproduire. . 


OAD clé: le modèle basé sur les Degrés-jours 

Pour optimiser les interventions, il est crucial de connaître précisément le moment où le doryphore est le plus vulnérable. C’est là qu’intervient notre modèle de gestion basé sur les Degrés-jours.

Développé en collaboration avec le Centre de Recherche et de Développement d’Agriculture et Agroalimentaire Canada et validé au cours des 3 dernières années dans notre région, le modèle repose sur le calcul des sommes de températures pour chaque étape du développement du doryphore. Les calculs démarrent à l’observation des premiers œufs dans les parcelles (biofix) et permet de suivre l'évolution des larves en fonction des conditions climatiques. Le modèle détermine ainsi les périodes de sensibilité maximale du doryphore, à savoir les stades larvaires jeunes (L1-L2), où le ravageur est plus particulièrement vulnérable. On visualise ainsi les dates propices aux interventions 🖕

En pratique, le modèle aide les producteurs à programmer leurs intervention en se basant sur des données climatiques locales et la biologie du doryphore. Ce type d'outil est essentiel pour maximiser l'efficacité des traitements tout en minimisant les coûts et l'impact environnemental.

Le modèle DORYPHORE est disponible sur le Hub@grimétéo de la plateforme oad.agrimétéo.eu

Dans le cas où vous n'avez pas encore l'onglet 'SUIVI des INSECTES' dans le menu de votre Hub, demandez-nous de l'activer; il n'y a pas de coût supplémentaire.

Les résultats de recherches récentes

Récemment des solutions alternatives à la lutte contre le doryphore de la pomme de terre qui ont été testées par Fredon Hauts-de-France dans le cadre de leurs recherches agroécologiques.

1. Organismes Entomopathogènes : Nématodes et Champignons

Les recherches ont montré que les organismes entomopathogènes (nématodes et champignons) constituent une alternative prometteuse. Les tests menés sur Steinernema carpocapsae et Steinernema feltiae (deux espèces de nématodes) ont révélé des efficacités comprises entre 34% et 55% pour le premier, et 4% à 48% pour le second. Ces résultats montrent que les nématodes sont capables de réduire les populations de doryphores, mais leur efficacité varie en fonction des conditions climatiques, particulièrement de l’humidité.

Concernant les champignons entomopathogènes, deux espèces ont été testées : Beauveria bassiana et Metarhizium brunneum. Beauveria bassiana s’est montré plus efficace, avec des réductions de populations larvaires allant jusqu’à 60% après la deuxième application, tandis que Metarhizium brunneum a donné des résultats nettement moins satisfaisants.

Avantages :

  • Ciblent spécifiquement le doryphore sans nuire à d’autres insectes.
  • Moins d’impact environnemental que les produits chimiques.
  • Adaptés à l’agriculture biologique.

Limites :

  • Nécessitent une humidité élevée pour être efficaces, rendant leur application dépendante des conditions climatiques.
  • Les jeunes stades larvaires (L1-L2) sont plus vulnérables, donc un traitement précoce est nécessaire.
  • Leur coût reste relativement élevé, ce qui pourrait poser des difficultés pour les petits producteurs.
​2. Huiles Essentielles et Pl​antes Naturelles

Plusieurs huiles essentielles et décoctions de plantes ont des effets répulsifs ou antiappétants contre le doryphore. Parmi les solutions étudiées, l'huile essentielle de tanaisie, de houblon, de sauge officinale, et les décoctions de géranium zonal ont été particulièrement notées pour leurs effets sur les larves.

Résultats intéressants :

  • Géranium zonal et cataire ont montré un effet antiappétant puissant, souvent accompagné d’une létalité pour les jeunes larves de doryphore, ce qui les rend particulièrement prometteurs dans les traitements précoces.
  • Les huiles essentielles de houblon et sauge ont également montré un effet répulsif, bien qu’avec une efficacité limitée par rapport aux autres traitements.

Avantages :

  • Méthodes naturelles et moins polluantes pour l’environnement.
  • Potentiel d’utilisation dans l’agriculture biologique.

Limites :

  • Efficacité variable en fonction des conditions d’application (température, humidité).
  • Moins efficaces que les autres solutions comme les nématodes ou le biocontrôle.
3. Prédateurs Naturels : Chrysoperla carnea et Coccinelles

Les prédateurs naturels du doryphore, comme les chrysope verte (Chrysoperla carnea) et les coccinelles ont également été évalués Les tests ont montré que les larves de chrysope étaient efficaces pour éliminer les jeunes larves de doryphore. Une chrysope peut éliminer en moyenne 8,8 larves L1 et 4,2 larves L2 en 48 heures, ce qui est un résultat encourageant.

Les coccinelles à sept points (Coccinella septempunctata) et l’espèce asiatique Harmonia axyridis ont aussi été étudiées. L'espèce asiatique s'est révélée particulièrement efficace, en consommant tous les œufs de doryphores en moins de 45 heures.

Avantages :

  • Solutions naturelles et respectueuses de la biodiversité.
  • Pas de coûts supplémentaires pour les producteurs une fois les prédateurs installés.

Limites :

  • Les coccinelles ont montré une capacité de prédation limitée pour les œufs de doryphores, et leur efficacité est insuffisante dans les stades larvaires.
  • Les prédateurs naturels peuvent ne pas être disponibles ou suffisamment abondants dans toutes les parcelles.
4. Lutte Mécanique : B​rosse​ à Doryphore

Une autre solution est la lutte mécanique via des brosses manuelles ou automatiques qui permet de brosser les feuilles des plants de pommes de terre pour faire tomber les larves. Cette méthode est particulièrement utile pour les premières infestations, avant que les larves ne se nymphosent dans le sol.


Avantages :

  • Méthode sans produits chimiques, idéale pour l’agriculture biologique.
  • Simple à mettre en œuvre, et immédiatement efficace.

Limites :

  • Chronophage et nécessite un équipement spécialisé (comme le Colorado Beetle Catcher, qui, bien que performant, est coûteux et réservé aux grandes surfaces).


Conclusion : une gestion intégrée et optimisée

La lutte contre le doryphore de la pomme de terre s'oriente vers une approche combinée, intégrant biocontrôle, solutions naturelles, lutte mécanique et modélisation climatique. De nouvelles alternatives voient le jour, offrant aux producteurs des solutions adaptées à un contexte de plus en plus contraint. Cependant, pour qu'elles soient efficaces, il est crucial d’intervenir au moment précis où les larves sont les plus vulnérables.

L'OAD -doryphore du Hub@grimétéo accompagne les agriculteurs en leur permettant de calculer les Degrés-jours et de suivre ainsi l’évolution de la population de doryphores. La modélisation aide à déterminer le moment optimal d'intervention, améliorant ainsi son efficacité. L'utilisation combinée des solutions biologiques et du modèle de gestion degrés-jours offre une stratégie intégrée de lutte, alliant réduction des intrants chimiques et optimisation des rendements.


Les producteurs de pommes de terre et leurs conseillers disposent désormais d’un outil puissant pour prendre des décisions éclairées et efficaces dans la gestion de ce ravageur.

Descriptif du modèle


 

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